Nous avons conduit pour le compte du Ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, l’évaluation de 14 projets lauréats du programme de soutien à l’innovation sociale « La France s’engage », label ayant vocation à mettre en valeur, soutenir et faciliter le déploiement de projets d’innovation sociale.
Lancé en juin 2014, le programme « La France s’engage » a été initié par la Direction de la Jeunesse, de l’Éducation Populaire et de la Vie Associative (DJEPVA) du Ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. Il vise à sélectionner, valoriser et soutenir des projets socialement innovants, d’intérêt général, portés par des individus, des associations, des fondations ou des entreprises par le biais d’un appel à projets ouverts.
A l’origine de ces innovations sociales se trouvent des innovateurs aux compétences, motivations et profils variés, ayant fait le constat d’un besoin non ou mal couvert par les réponses existantes : difficultés d’intégration des réfugiés, exclusion bancaire, isolement des personnes âgées, souffrance d’un proche en situation de handicap, difficulté d’hébergement,… L’absence de réponse au problème rencontré leur inspire un projet innovant devant apporter une solution nouvelle pour y remédier.
Dans le cadre du programme, chaque année, les nouveaux lauréats bénéficient d’un accompagnement stratégique ou opérationnel ainsi que d’un soutien financier pluriannuel. Une des finalités de « La France s’engage » est de permettre à ces projets de « changer d’échelle », autrement dit de toucher un public plus large ou d’essaimer sur d’autres territoires. L’évaluation fait partie intégrante de l’appel à projets.
Nous avons ainsi évalué 14 des projets récompensés par ce label intervenant dans le domaine « Lutte contre les exclusions / Santé ».
L’évaluation du programme a eu pour objectif d’apporter des éclairages sur ces innovations et leur déploiement : Quels sont les types d’innovation sociale et profils des innovateurs ? Comment les projets se développent-ils et se pérennisent-ils ? Quelle est la plus-value du programme « La France s’engage » pour ces projets ?
Dans un premier temps, nous avons conduit une revue de littérature scientifique devant permettre de définir les critères d’innovation sociale, en particulier dans le champ de la Lutte contre les exclusions et de la santé, et d’identifier les modèles de changement d’échelle des projets d’innovation sociale. En effet, si des travaux existent en la matière, la conceptualisation de l’innovation sociale est encore loin d’être stabilisée, celle-ci pouvant être analysée au regard de son objet (innovation technologique, innovation de procédé…), de ses cibles ou encore de son intensité (innovation incrémentale, innovation radicale…).
D’une façon générale, l’innovation sociale est très liée à l’expérimentation. Mais au-delà de l’étape d’expérimentation, les projets doivent construire leur légitimité, enjeu d’autant plus prégnant pour des projets qui par définition « sortent des cadres ». Lorsqu’ils se trouvent dans une phase de changement d’échelle ces projets ont alors vocation à préserver ou maximiser leur impact social, processus recouvrant plusieurs étapes, depuis l’émergence d’un facteur conduisant à penser le changement d’échelle jusqu’à la mise en œuvre de celui-ci et son évaluation en passant au préalable par la définition de la stratégie de changement d’échelle et du modèle économique associé.
In fine, ce premier temps portant sur l’état de l’art nous a permis de définir un cadre théorique, en amont des investigations de terrain, à l’aune duquel les projets et leur modèle de changement d’échelle ont été analysés.
Le cœur de l’évaluation a reposé sur la conduite d’entretiens qualitatifs auprès des différents acteurs impliqués directement ou indirectement dans la mise en œuvre des projets : représentants des lauréats, bénévoles, partenaires institutionnels ou opérationnels, bénéficiaires. Ces entretiens ont eu vocation à aborder les questions de stratégies d’innovation et de changement d’échelle des projets lauréats, la mise en œuvre de ces innovations (en termes d’effets, de leviers ou de freins à l’innovation et son extension…) ainsi que les apports de l’initiative « La France S’engage » du point de vue des différentes parties prenantes des projets.
L’analyse issue de ces entretiens, fondée sur les 14 projets investigués, a permis de mettre en évidence ce qui converge entre les projets ou au contraire ce qui les distingue, notamment via l’élaboration de typologies (typologie des innovateurs, typologie des modèles de changement d’échelle) ou encore les facteurs propices ou limitant vis-à-vis de leur développement.